Le manifeste.
Pastel sec, acrylique, 70 x 100 cm, 2022
Si les femmes sont réduites à leur corps et appréhendées dénuées d’esprit depuis l’érection des premières citées, leur existence restreinte à la maternité et au plaisir masculin, traditionnellement saintes ou souillées, leur corps instrumentalisé, acheté, offert, vendu, dépossédé de toute existence en dehors de sa matérialité ;
si ce corps est depuis objet de conquête, dominé, battu, violé ; si la société nous martèle que nous ne sommes qu’enveloppe charnelle, pourtant, au-delà, nous sommes. Nos corps sont des champs de bataille. Ils sont réduits à de la chair colonisée, terrains d’une guerre constante, une guerre invisibilisée, silenciée, dont les enjeux sont pourtant notre individualité, notre liberté à exister en et au delà d’eux.
Cette bataille se joue sur tous les fronts. Avant même d’atteindre le pavé des rues, elle se joue en nous-même puis dans notre maison. Elle se joue dans nos chambres, dans nos lits. Ce corps que l’on offre aux autres quand on ne nous autorise pas à le posséder pour nous-même, ce corps donné, pris, volé. Ces caresses qui engendrent tant de frissons, tantôt délectables, tantôt répugnantes. Tantôt voulues, tantôt conspuées.
Ces caresses qui nous ramènent à notre état de chair, d’animal, ces actes dont les images nous sont martelées à tous les coins de rues, regards, réflexions, affichages, médias. Ces images et ces violences que l’on ne peut fuir, enfermées dans nos prisons de peau, empêchées d’en séparer notre esprit, muselées, enchaînées. Réduites à cette chair qui n’est pas nôtre, réduites à cette chair, toujours. Et pourtant, en dessous. Et pourtant, au delà. Nous sommes.
Dans De Chair et d’Os, l’empreinte de la caresse, comme une brûlure sur ce corps chahuté, laisse apparaître ce qui nous lie, ce qui nous constitue tout un chacun·e : l’ossature. Si le squelette symbolise tant le corps lui-même que sa fin inéluctable, symboliquement il permet également d’évoquer l’humain débarrassé de son injonction au genre comme de tout autre distinction sociale. Si l’être vibre en tout point, quand la chair est bousculée par la texture mouvementée et ses couleurs contrastées, les os baignent alors quant à eux dans une lumière vive émanant du coeur.
Brisons nos carcans, réapproprions nous nos corps, allons au delà.